Drame à l'Opéra

Un « quoique » mémorable !

< mardi 26 janvier 1999 >
Chronique

En matière de grammaire, les dictées se suivent et ne se ressemblent que trop, les pièges étant en nombre fini... C'est ainsi que la finale des Dicos d'or du 16 janvier dernier a, une fois de plus, largement puisé dans le répertoire des grands classiques : imparfait du subjonctif (le fût fait partie des... canons du genre) et accord du participe passé des verbes pronominaux (Ah ! ce bon vieux plu qui ne s'accorde jamais...). Au cœur de cette partition bien orchestrée, cependant, on relèvera avec intérêt un quoique auquel, c'est vrai, il fallait bien s'attendre à l'Opéra. D'autant qu'il ne s'agissait pas ici, comme souvent, de décider s'il convenait de l'écrire en un ou en deux mots, mais d'un problème beaucoup plus épineux, qui est celui de l'élision : avait-on le droit de remplacer ici le e muet par l'apostrophe chère à Pivot et d'écrire Quoiqu'étonnés ? Eh bien, non ! La règle stipule que pareille liberté n'est concevable que devant il(s), elle(s), un(e) et on. On écrira donc Quoique aux États-Unis, quoique en France il fasse beau et non Quoiqu'aux États-Unis, quoiqu'en France... À la réflexion, il pourrait s'agir là de l'éclaireur avant la troupe car, en français, quoique n'est pas le seul terme à poser ce genre de problème : il se pourrait bien que l'on généralisât, dans les prochaines dictées, ce piège dont on n'a usé jusqu'ici qu'avec parcimonie, et que l'on vît se multiplier des expressions comme entre autres, entre eux (jamais entr'autres, entr'eux), lorsque arrive l'été (et non lorsqu'arrive), presque à contrecœur, presque en même temps (l'intéressé ne s'élide que dans le mot presqu'île), puisque au fond (et non puisqu'au fond), etc. Voilà qui n'a l'air de rien mais qui pourrait bien plonger nos candidats dans des abîmes de perplexité car, de jusque qui s'élide toujours devant une voyelle (jusqu'alors, jusqu'ici, jusqu'en) à entre qui, on en a vu des exemples plus haut, ne s'élide jamais, on passe par toute une gamme de directives sur lesquelles les grammairiens sont loin de toujours s'accorder. De quoi améliorer l'ordinaire de la dictée... et ménager, à terme, de nouveaux couacs !