À la fortune du mot

< mardi 9 avril 1996 >
Vocabulaire

Quand, au dire d'Alphonse Allais (et de beaucoup d'autres depuis), nous ne serions pas des bœufs, nous n'en devons pas moins à la gent bovine bon nombre de nos expressions usuelles...

Un effet bœuf. Le ministre britannique de la Santé peut se vanter de celui qu'ont produit ses récentes déclarations ! L'image renverrait au bœuf gras, cette vedette incontestée du carnaval que l'on exhibait triomphalement en tête du défilé.

Piquer son bœuf. À n'en pas douter, c'est ce qu'aura fait John Major en apprenant la décision de Bruxelles... Cet équivalent de piquer un fard, piquer sa crise s'explique de toute évidence par la couleur rouge du rosbif.

Avoir un bœuf sur la langue. L'expression, dont on pourrait croire qu'elle a été forgée tout exprès pour traduire l'embarras des politiques dans cette affaire de vaches folles, signifie « s'abstenir de parler ». C'est que les monnaies de l'Antiquité, qui achetèrent bien des silences, étaient souvent frappées à l'effigie d'un bœuf, alors synonyme de richesse...

Un coup de pied en vache. Au contraire de la ruade classique, celui-là (que ne dédaigne pas le cheval à l'occasion) se décoche latéralement, et n'en est que plus traître. Un coup bas qui aurait nui à la réputation de notre ruminant, en réalité plus avachi que vachard...

Prendre la vache et le veau. C'est ce que fit le bon Panisse en acceptant d'épouser Fanny, pourtant enceinte des œuvres de Marius... La formule a passablement vieilli, et ce ne sont pas, a priori, les féministes qui s'en plaindront !