À la fortune du mot
Le nombre cinq a alimenté par le passé bien des locutions pittoresques, dont la plupart sont malheureusement tombées dans l'oubli. La preuve... par cinq !
Chercher cinq pieds à un mouton. C'est là, écrivait déjà Furetière en 1690, le propre de l'homme « qui veut tirer d'une chose plus qu'elle n'en peut fournir ».
Donner cinq et quatre. On a dit aussi donner la moitié de dix-huit. Cela revenait, si l'on en croit Alfred Delvau, qui décrit l'opération de manière toute scientifique, à « donner deux soufflets, l'un de la paume de la main, où les cinq doigts assemblés frappent ensemble, l'autre du revers de la main, le pouce demeurant alors sans action ». La symbolique des cinq doigts est à l'origine d'autres expressions, parmi lesquelles la si poétique giroflée à cinq feuilles...
Un cinq et trois font huit. Une façon comme une autre, en insistant sur sa démarche inégale, de désigner un boiteux. L'intention était peut-être moins cruelle qu'on ne l'imagine : ne s'agissait-il pas, hasarde Alain Rey, de suggérer que le boiteux avance tout aussi sûrement qu'un autre, quatre et quatre ne faisant pas plus ?
Le cinquième quart de la journée. Dans l'argot du XIXe siècle, l'expression a servi à désigner la prostitution des ouvrières après les heures de travail.
Mettre cinq et retirer six. Nous avons conservé celle-là pour la bonne bouche : il était en effet question, dans le langage ô combien imagé du XVIIe siècle, de plonger la main dans le plat pour en retirer un bon morceau. Notre époque, pour être moins gourmande, n'est pas plus diplomate : n'y met-elle pas quelquefois les pieds ?