« Affecté » ou « infecté » par
le coronavirus ? Écoutez la différence...

< dimanche 29 mars 2020 >
Chronique

Il arrive que la langue se montre bonne fille : l'un et l'autre se disent. Pas pour signifier exactement la même chose, certes, mais vous vous verrez souvent accorder le bénéfice du doute, c'est déjà ça !

Infecté ne s'emploie que pour parler d'une infection par un virus, de quelque nature qu'il soit. Votre ordinateur peut l'être par un maliciel (recommandation officielle pour faire pièce à l'affreux « malware ») ; deux secrétaires d'État et le ministre de la Culture l'ont été, eux, par le Covid-19. Mais si ces derniers sont fondés à se dire également affectés, soit « attristés » par la chose (il est rare que l'on se réjouisse d'être malade), la machine, elle, ne l'est jamais, du moins dans ce sens. Quelque intelligente qu'on la suppose — le plus souvent à tort d'ailleurs —, elle n'éprouve rien. Partant, pas question pour elle de tomber dans... l'affliction !

Cela dit, le verbe affecter comporte tellement d'acceptions en français — et notamment celle, autrement vague, de « toucher, frapper » — que la machine susdite est autorisée à revenir en deuxième semaine : nul ne trouvera anormal que « tous les ordinateurs d'une entreprise soient aussi affectés », cela vaudra toujours mieux que l'affreux « impactés », qui fait actuellement florès. Il suffit du reste de parcourir la Toile pour constater que tout est aujourd'hui affecté par la pandémie : l'économie mondiale, le fonctionnement de l'institution judiciaire, le commerce de détail, le marché du pétrole, le tourisme, le secteur de l'horticulture, le sport professionnel, le coefficient UEFA, la sortie du dernier film de James Bond... et tutti quanti !

Pour rendre les choses moins risquées encore, les termes infection et affection ont tous deux droit de cité dans le vocabulaire médical. Le premier dans le sens étroit précisé plus haut, le second pour désigner n'importe quelle maladie (« tout processus morbide, organique ou fonctionnel », dixit le Petit Robert). À cette aune, et comme qui peut le plus peut le moins, toute infection peut à bon droit être considérée comme une affection. Mais pas l'inverse !

Quant à infester, la médecine le réserve aux parasites non microbiens. Mais c'est surtout au figuré qu'on s'en sert aujourd'hui. Du côté de Noirmoutier, notamment, où l'on se plaint d'être infesté de Parisiens en transhumance...