Participe passé (5) :
une réforme de toute façon inutile...

< dimanche 21 octobre 2018 >
Chronique

Si, comme en 1990, l'idée est de mettre un frein à l'inexorable dégradation de l'expression dans les copies de nombre d'élèves, il est à craindre que ce ne soit raté par avance. Le problème, on ne le dira jamais assez, n'est pas là.

Déjà, à l'époque des Rectifications suggérées par le Conseil supérieur de la langue française et approuvées de la pointe du bicorne par une Académie plus qu'hésitante, l'initiative était venue d'une (petite) partie de la gent enseignante, et notamment du secrétaire du Syndicat national des instituteurs d'alors, Jean-Claude Barbarant.

Cette fois encore, nous l'avons signalé, ce sont deux anciens professeurs de lettres belges qui secouent le cocotier. Ils ont pourtant été remarquablement placés pour savoir, comme nous l'avons été de notre côté, que moins on attend des élèves, moins on en obtient. L'accord défectueux du participe passé n'est qu'une goutte d'eau dans la mer des inconséquences qui poussent nos progénitures à accoupler, sans gêne apparente, masculin et féminin, singulier et pluriel, passé et futur. Et l'expérience prouve malheureusement que, dans ce domaine, beaucoup restent élèves toute leur vie.

Nous entendions récemment, sur le plateau du « Canal Football Club », une chroniqueuse dont la féminité ne nous a paru faire aucun doute expliquer qu'elle s'était mis (pas l'ombre d'une liaison pour sauver les apparences) dans la peau de l'entraîneur nantais Miguel Cardoso, et que ce ne devait pas être facile à vivre.

La règle de l'accord du participe passé avec l'auxiliaire être ne compte pas parmi les plus ardues de notre syntaxe et, à notre connaissance, il n'a jamais été question de la réformer. Il faut croire que c'est encore trop pour les paresseux qui rêvent ouvertement d'une langue où, à l'instar de l'anglais, l'adjectif lui-même serait invariable en genre comme en nombre. Preuve que le désastre actuel doit infiniment plus au manque d'attention et de rigueur qu'à une orthographe prétendument exigeante.

Un comble, soit dit en passant, à une époque où nos féministes réclament pour la femme une visibilité plus grande dans la langue. Avant de défigurer cette dernière de leurs inesthétiques points milieux, tout ce beau monde ne devrait-il pas déjà se battre pour qu'apparaisse la marque du féminin là où la grammaire l'impose depuis toujours ?