Des images et des expressions
comme... s'il en pleuvait !

< dimanche 5 juin 2016 >
Chronique

Quand elle se déchaîne, comme ce fut le cas ces derniers jours, la nature est partout la même. Pour la décrire dans son arrogance, chacun a pourtant ses mots. Tour d'un horizon contrasté autant que bouché...

En France, il pleut « des cordes », voire « des hallebardes ». Évidente comparaison avec ces traits que l'on observe dès qu'une averse — pardon, une drache ! — s'abat dru. Mais l'Allemand y verrait plutôt « des ficelles », l'Espagnol « des piques », le Brésilien « des canifs », le Grec « des pieds de chaise », le Néerlandais « des tuyaux de pipe » et l'Anglais « des tringles d'escalier » ! De quoi alimenter la Grande Braderie de septembre, même si l'on sait qu'il y fait (presque) toujours beau.

Là ne se borne pas, cependant, l'imagination du « saucé », lequel n'est jamais avare de métaphores de la plus belle eau. Nos amies les bêtes (lointain souvenir de l'arche où elles prirent place un jour de Déluge ?) paient elles aussi un lourd tribut aux cataractes du ciel : « grenouilles » en polonais, « jeunes chiens » en allemand. Mais l'exemple le plus confondant reste, et d'assez loin, l'anglais, où il pleut « des chats et des chiens ». L'expression (« it's raining cats and dogs ») aurait été utilisée pour la première fois par le grand Jonathan Swift lui-même, en 1738. Quand les témoignages de pluie animale abonderaient dans les littératures antique et médiévale, quel whisky nos amis d'outre-Manche ont-ils pu consommer sans modération pour voir ainsi dégringoler Figaros et Médors ?

Les hypothèses ne manquent pas, ce qui veut souvent dire, en la matière, qu'aucune d'elles ne s'impose vraiment. D'aucuns, trop heureux de rendre à l'anglais triomphant la monnaie de sa pièce, plaident pour une déformation de l'ancien français catadoupe, « chute d'eau » : le Was ist das ? allemand est bien devenu vasistas ! D'autres, que le militantisme linguistique motive moins, supposent plus prosaïquement que les fortes pluies précipitaient des gouttières des cadavres d'animaux, parmi lesquels, essentiellement, des chats et des chiens. D'autres encore préfèrent se raccrocher à une explication moins macabre : lesdits animaux auraient été bien vivants, mais, délogés par la pluie de combles souvent peu étanches, ils auraient fui les gouttes en se réfugiant juste au-dessous, dans les chambres.

Faites donc vos jeux ! Le principal n'est-il pas que la question vous ait... plu ?