Les traditionalistes britanniques s'arrachent les cheveux

Blair a la moumoute dans le nez !

< mardi 20 mai 2003 >
Chronique

Est-ce de voir sa Cherie ainsi affublée qui le met de mauvais poil ? Ou que l'on fasse régulièrement de lui le caniche de George Bush ? Toujours est-il que Tony Blair, un révolutionnaire à tous crins qui n'a jamais caché son intention de faire table rase du passé, vient de déclarer la guerre à... la perruque. Du moins à celle que, tradition oblige, se voyaient jusqu'ici contraints d'arborer, pour exercer leur art, les avocats du Royaume-Uni : un prochain arrêté devrait en effet les dispenser de cette obligation séculaire. Mais le pli est pris et, loin de susciter un enthousiasme échevelé, la perspective semble coller les boules aux intéressés, en même temps que, pour les plus avancés en âge, elle promet de les leur mettre à zéro ! Gardons-nous d'intervenir dans un débat dont beaucoup pensent qu'il frise surtout le ridicule : passons plutôt au peigne fin ces quelques cheveux qu'il nous arrive de trouver sur la langue française et qui, à l'occasion, nous feraient zozoter. Nous voulons parler par exemple de cette forme châtaine qui a tout de la bogue, et à propos de laquelle nos dictionnaires se crêpent allègrement le chignon : inconnue du Petit Larousse, ladite forme figure en entrée dans le Grand Usuel de la même maison ! Merci au Lexis, autre produit de la gamme, de couper court à toute spéculation : le féminin châtaine existe mais « on l'emploie rarement ». Il est vrai que, le plus souvent flanqué d'un adjectif qui le modifie, châtain suit la règle des adjectifs de couleur et reste alors invariable : des reflets châtain clair, une tignasse châtain foncé... Autre pierre d'achoppement qui se révèle rasoir à la longue : ces cheveux filasse, où le commun des mortels croit mordicus déceler du raide et du filamenteux alors que, par référence à la filasse, matière textile végétale non encore filée, il n'est question que de leur blondeur fade, pour tout dire proche du blanc. Pour gênante qu'elle soit, la confusion s'explique aisément : avoir les cheveux comme de l'étoupe, c'est effectivement les avoir emmêlés et en mauvais état... et l'étoupe n'est autre chose que la partie la plus grossière de la filasse ! Décidément, d'un côté comme de l'autre de la Manche, les cheveux sentent la poudre, et l'on ne saurait trop conseiller à Tony Blair de cesser de les couper en quatre s'il ne veut pas, lors des prochaines élections, se faire coiffer !