À la fortune du mot
Les verbes ci-dessous ne manquent pas de nous poser quelques problèmes en matière d'orthographe : -oter ou -otter ? Leurs origines pittoresques, heureusement, font qu'on leur pardonne...
Asticoter. La tradition veut que ce verbe soit issu de dasticoter qui, au XVIIe siècle, signifiait « parler une langue incompréhensible ». Dasticot était en effet le seul mot que croyaient attraper au vol les paysans du nord et de l'est de la France chaque fois que, durant la guerre de Trente Ans, les fantassins d'outre-Rhin prenaient leurs fermes d'assaut : il s'agissait en fait des premiers mots d'un juron, dass dich Gott... (que Dieu te... maudisse) ! Alain Rey n'en fait pas moins la fine bouche : comment serait-on passé, objecte-t-il, du sens de jargonner en allemand à celui d'agacer ? Lui croit plutôt à l'influence de la forme dialectale astic, laquelle aurait désigné dans le Nord et en Belgique un outil qui pique...
Barboter. Si, dans la langue familière, le mot a pris le sens de dérober, c'est sans nul doute parce que le voleur fouille vos poches avec la même maestria que le canard la boue de son étang !
Boycotter. Sait-on toujours ce que ce verbe doit à un certain Charles Boycott, régisseur irlandais qui fut mis à l'index, en 1880, pour n'avoir pas obéi aux injonctions de la Ligue agraire ? Ce riche propriétaire refusait en effet de baisser les loyers.
Mégoter. Si le sens de « parier un cigare » s'est évanoui en fumée, celui de « lésiner » est encore vivace. Pour beaucoup, mégot dériverait de l'ancienne forme dialectale mégauder, qui signifiait « sucer le lait de la mère » ! C'est que le fumeur s'acharne sur son mégot avec autant de conviction que le nourrisson sur le téton...