À la fortune du mot

< mardi 12 juillet 2005 >
Vocabulaire

On ne peut pas dire que Jacques Chirac ait la baraka en ce moment. D'aucuns lui auraient même déconseillé de se rendre à Singapour, compte tenu de la... scoumoune qui semble le poursuivre. Mais d'où vient ce mot curieux ? Et, d'une façon plus générale, quelle est l'origine des vocables qui expriment la malchance ?

Cerise. Si l'on en croit Claude Duneton, celle-là a toujours eu partie liée avec la guigne évoquée ci-dessous, laquelle en est, comme on le sait, une variété. D'abord pour s'y opposer (à la fin du XIXe siècle, la cerise était encore synonyme de chance), puis pour s'y assimiler...

Guigne. Pour justifier l'image, on a évoqué ce bouquet de griottes séchées que l'on offrait, jadis, à l'infortuné conscrit qui, ayant tiré un mauvais numéro, devait partir pour l'armée. On préfère aujourd'hui l'expliquer par le verbe guigner, « regarder de travers » et, par extension, « jeter le mauvais œil ». Dans ses Fleurs du mal, Baudelaire avait, lui, recours à guignon.

Mouise. Apparenté, par l'étymologie, à mue(s)li, le mot nous vient de l'allemand dialectal Mues, « marmelade, bouillie ». On ne voit que trop clairement le rapport avec la panade ou la purée, elles aussi préposées à l'expression de la déveine...

Poisse. Particulièrement vivace dans l'argot des coureurs cyclistes, celle-là a d'abord désigné, au XVIIIe siècle, un fagot enduit de poix qui servait à la défense des places de guerre. Et comme la poix, matière visqueuse s'il en est, ne vous lâche pas plus facilement que la malchance...

Scoumoune. Quand ce mot du français d'Algérie nous aurait été transmis par les truands corses et marseillais, son origine n'en est pas moins noble. Il descendrait en effet du latin excommunicare, « excommunier » !