À la fortune du mot
Tel est pris qui croyait prendre ! Mardi dernier, les organisateurs du Grand Concours de TF1 ont cru bon de soumettre aux « grosses têtes » de Philippe Bouvard une question qui avait trait à l'orthographe. Parmi quatre noms composés en porte- donnés au pluriel, il s'agissait de trouver celui qui s'écrivait avec un s dès le singulier. La bonne réponse était porte-jarretelles et à cela nul ne trouvera évidemment à redire. Le hic, c'est que dans l'échantillon proposé on relevait des « porte-fenêtres » de bien curieuse facture ! Il suffit en effet d'ouvrir un dictionnaire pour se voir confirmer que le pluriel adéquat est « portes-fenêtres »... avec deux s plutôt qu'un ! C'est que ce mot-là, en dépit des apparences, n'a rien à voir avec les autres. L'élément porte n'est pas ici le verbe que l'on rencontre dans porte-bébé, porte-couteau ou porte-étendard, porte-avions, porte-bagages ou porte-revues (peu importe, de ce point de vue, que le second élément prenne ou non un s au singulier) et dont l'invariabilité va de soi. Il s'agit bien sûr du nom (au risque de l'enfoncer alors qu'elle est grande ouverte, rappelons que la « porte-fenêtre » est une fenêtre qui fait également office de porte !), qui n'a aucune raison, lui, de rester invariable. On ne peut pas même se retrancher là derrière l'exception : il est habituel que le nom composé formé de deux noms en apposition prenne la marque du pluriel aux deux éléments, comme en témoignent, pour ne citer que ceux-là, les cannes-béquilles, les chirurgiens-dentistes, les draps-housses, les montres-bracelets et les wagons-restaurants... Pourvu que les recalés du jour n'aillent pas, comme au CAPES, réclamer l'annulation de l'épreuve pour vice de forme !