Après le « virus chinois »
de Donald Trump,
« le virus anglais »

< dimanche 29 novembre 2020 >
Chronique

Pendant la crise, la colonisation linguistique continue ! Si chaque pays, on le déplore assez, se replie sur lui-même pour lutter contre la pandémie, les mots pour le dire restent en anglais dans le texte.

Ce fut d'abord ce cluster accueilli à bras ouverts dans nos campagnes, au nez et à la barbe de notre « foyer » à nous. Des épidémiologistes ont reconnu qu'on y avait perdu en clarté, mais allez demander à un scientifique rompu au globish d'une recherche mondialisée de se défaire de ses habitudes ! Lui reprocher de ne point se draper dans un patriotisme linguistique que les médias, il faut bien l'avouer, ne sont pas les derniers à fouler aux pieds !

Ce fut ensuite le trop fameux stop and go, cette tactique au coup par coup qui, à seule fin de mettre notre système hospitalier à l'abri de la saturation, nous condamne à alterner, dans l'attente d'un vaccin, phases de rigueur et de laisser-aller. Il est vrai que l'on n'avait pas attendu le coronavirus pour donner dans ce basic English. Il suffit de se rappeler la cavalière façon dont nos TGV à bas coût (pardon, low cost !) se sont vu rebaptiser Ouigo pour mesurer les verges que nous sommes prêts à tendre pour nous faire fouetter...

Mais le meilleur était à venir. Depuis quelques semaines, c'est le click and collect qui fait rage. Force est d'admettre que la chose existait déjà, mais les circonstances l'ont définitivement adoubée, de même que la formule qui la désigne. Comprenant que ce n'était pas notre trop sage « retrait en magasin » qui pourrait s'opposer longtemps à un slogan aussi... rock'n'roll, d'aucuns se sont alors empressés de bâtir des digues. On a même vu le gouvernement monter au créneau par le biais de son bras armé, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France. Très vite a été proposé le « cliqué-retiré », ainsi que sa variante, le « cliqué-livré ». Davantage dans l'air décontracté du temps, quand chacun sentirait que le retard pris à l'allumage se rattrape difficilement.

À quand une appli sur notre portable qui nous apprendrait que, pour avoir usé d'une expression douteuse dans un texto, nous sommes invités à observer une « septaine » en compagnie de Grevisse ? Mais combien serions-nous à la télécharger ? Et combien à jouer les vierges effarouchées devant ce flicage, indigne du pays de liberté dans lequel nous vivons ?