Comme celles du Seigneur,
les voies de « fait » sont souvent impénétrables !

< dimanche 18 novembre 2018 >
Chronique

Alors que nous déplorions, il y a peu, la tendance actuelle à ne plus accorder le verbe au participe passé avec son sujet féminin, un lecteur attentif remarque que l'inverse, pour être tout aussi condamnable, n'est pas rare !

Est-ce là un effet de ce que notre lecteur appelle le « féminisme activiste » ? Toujours est-il que le participe passé du verbe faire, censé rester invariable dès qu'il est suivi d'un infinitif, se voit féminiser plus que de raison dans des tours tels que « elle s'est faite conduire » ou « elle s'est faite amener les pièces à conviction ».

Il va sans dire que nous partageons cet agacement. D'abord parce que l'on considère aujourd'hui que ce participe fait corps avec l'infinitif qui le suit, constituant avec lui ce que les grammairiens appellent une « périphrase causative ». Ensuite parce que, si d'aventure nous prenait l'envie de traiter l'intéressé en verbe pronominal ordinaire, on s'apercevrait bien vite que le pronom se qui précède est complément d'objet direct du verbe à l'infinitif et non du participe dans le premier cas, complément d'objet indirect (« amener à elle ») dans le second, ce qui suffit, là comme ici, à justifier l'invariabilité.

Cela dit, et avant de rejeter la responsabilité de ce dérapage sur qui que ce soit, il faut se souvenir avec Grevisse que, jusqu'au XVIe siècle (une époque qui ne faisait pourtant pas une place démesurée aux revendications de la gent féminine), l'accord en la matière n'était pas rare.

Ajoutons, pour ne plus avoir à revenir sur le sujet, que les féministes récusent aujourd'hui « elle s'est fait violer » aussi bien que « elle s'est faite violer ». Il leur semble voir en effet dans ce tour syntaxique, et bien au-delà du problème de l'accord que nous soulevions plus haut, l'expression d'un consentement implicite, voire d'un encouragement qui ne reviennent déjà que trop souvent, on le sait, dans le système de défense des violeurs. Quand on ferait valoir que cette construction est, dans la langue courante, de plus en plus perçue comme l'équivalent d'un simple passif (en entendant dire qu'une personne s'est fait voler son sac, on soupçonne rarement cette dernière d'avoir commandité le larcin à seule fin d'escroquer l'assurance), le sujet est, par ces temps qui balancent volontiers leurs porcs, beaucoup trop sensible pour être évacué d'une simple boutade...