La semaine où le harceleur
s'est fait... apostropher !
Ces derniers jours, on n'aura parlé que de ce producteur de fictions hollywoodiennes qui n'en était pas moins porté sur certaines réalités. L'occasion d'un autre harcèlement, d'ordre linguistique celui-là...
Il nous a fallu en effet vérifier que cette institution de la langue française que constitue le « h » dit aspiré avait toujours cours ! On sait que l'intéressé, s'il ne donne pas lieu à une prononciation particulière, interdit en principe liaison et élision (cette substitution d'une apostrophe au « e » final de la préposition ou du déterminant qui précède). Or, qu'a-t-on lu partout ou presque, sur la Toile et dans les journaux ? Qu'« il y [avait] de plus en plus d'harcèlement » (RTL) ; que « Harvey Weinstein [avait] été accusé d'harcèlement sexuel à maintes reprises au cours des trois dernières décennies » (Elle) ; que Jeremstar [avait] été, lui aussi, « victime d'harcèlement sexuel par un producteur » (Yahoo actualités). Et l'on vous prie de nous croire sur parole si l'on vous dit que Libération, L'Obs, Le Parisien, Paris Match et même votre journal préféré sont, à l'occasion, également en cause !
Est-ce à dire que les jours dudit « h » aspiré sont comptés ? que ce dernier, pas plus que l'accord du participe passé ou le pluriel des noms composés, n'a sa place à une époque où l'on a pris l'habitude d'écrire d'abord, et de réfléchir ensuite ? Grevisse lui-même ne remarque-t-il pas depuis belle lurette que « la langue populaire ne respecte guère la disjonction (autrement dit l'interdiction de l'élision) devant h aspiré » ? Reconnaissons avec lui que, pour distinguer l'aspiré du muet, il faut souvent ouvrir le dictionnaire, ce qui est au-dessus des forces de bien des Français d'aujourd'hui.
Encore faudrait-il que l'on s'imposât un minimum de cohérence ! Car si ce « d'harcèlement » ne semble plus écorcher la moindre oreille, « le harcèlement » — pour combien de temps encore ? — fait, lui, de la résistance. En témoigne cette inconséquence relevée sur le site de France 2 : on commence par souligner la difficulté à « croire qu’aujourd’hui en France le harcèlement sexuel reste un crime impuni », pour s'étonner à la ligne suivante que, « dans un pays défenseur [...] de l’égalité entre tous, les femmes soient encore laissées pour compte dans les cas d’harcèlement » !
Comme n'aurait sans doute pas manqué de le souligner le regretté Coluche, pour les « z'handicapés z'harcelés », cela risque d'être dorénavant très dur — au moins à prononcer !