Mais comment peut-on
se faire « tailler un costard » ?
L'expression a connu un regain de faveur ces derniers jours. Mais elle a de tout temps été très vivace, avec d'autres du même... tissu, telles que « ramasser une veste » ou « être habillé pour l'hiver ». D'où sortent-elles ?
L'interprétation la plus simple, et aussi la plus répandue, se fonde sur une évidence : quand on veut dire du mal de quelqu'un, on lui met toutes sortes de choses sur le dos, au besoin en y « cassant du sucre » ! D'aucuns, par les temps électoraux qui courent, ont d'ailleurs intérêt à l'avoir large, ce dos, pour accueillir les couches serrées d'opprobre qui viennent quotidiennement le couvrir... En ce sens, « tailler un costard » ne se distingue guère de sa quasi-variante « habiller pour l'hiver », qui regagne en intensité ce qu'elle perd en précision vestimentaire !
On remarquera toutefois que, comme souvent sur le terrain d'une étymologie qui fait rarement dans l'unanimité béate, cette thèse n'est pas partagée par tous. Daniel Lacotte, auteur du Dictionnaire insolite du français truculent (Larousse), préfère voir dans ce « costard », et au prix d'une métonymie, le policier qui, pour opérer plus discrètement, ne portait pas l'uniforme. Partant, dans le langage fleuri des malfrats du XIXe siècle, « tailler un costard à quelqu'un », c'était ternir sa réputation en l'assimilant à un indicateur, dont on ne manquerait pas de se détourner.
Et la veste, nous direz-vous ? Celle-là même que plus d'un candidat endosse chaque nuit dans le secret de ses cauchemars... Si l'on en croit Claude Duneton, il s'agit de tout autre chose. D'un rapprochement avec ce capot honni des joueurs de cartes, qu'effraie la perspective de ne pas faire la moindre levée. Le capot en question n'était au fond pas si éloigné de notre costard, puisqu'il désignait un manteau muni d'un capuchon bien pratique pour y cacher sa honte ! De capot on serait alors passé au féminin capote, puis à la veste susdite...
Il se trouvera sans doute des espiègles pour observer que si l'on est, en pareille circonstance, tenté de couvrir le haut, il arrive également que l'on enlève le bas ! Témoin cette mémorable « déculottée » que les joueurs du PSG viennent de prendre à Barcelone. On comprend mieux ces huit minutes qu'il a fallu à Serge Aurier pour entrer sur le terrain à Lorient : à quoi bon enfiler ce qu'on sait devoir ôter peu après ?