Le calcul,
synonyme d'opérations en tout genre...
Il est des cas où l'actualité semble faire un clin d'œil à l'étymologie. L'hospitalisation passablement médiatisée, la semaine dernière, de François Fillon en fait de toute évidence partie.
Le malheureux — difficile d'appeler d'un autre nom celui à qui il ne suffit pas de quitter les béquilles pour être sur pied — n'a-t-il pas été admis au Val-de-Grâce pour un calcul ? « Un seul ? Sans doute celui de la division de l'UMP », n'aura pas manqué d'insinuer son camarade de parti et néanmoins ennemi Jean-François Copé, toujours prompt à sous-entendre que, de calculs et d'arrière-pensées, l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy n'est décidément pas avare...
Mais laissons là l'hospice se moquer de l'hôpital et la Charité du Val-de-Grâce (en matière de calcul, le député-maire de Meaux est, de son côté, passé maître dans la multiplication... des pains au chocolat) pour nous intéresser à la seule question qui vaille dans le cadre d'une rubrique telle que celle-ci : comment un seul et même mot a-t-il bien pu s'appliquer à deux réalités aussi dissemblables que la « concrétion pierreuse qui se forme dans un canal ou un organe » d'une part, et la « mise en œuvre des règles élémentaires d'opérations sur les nombres » d'autre part ?
Rien que d'évident pour ce qui est de la première acception : il suffit d'avoir aperçu, une fois dans sa vie, ce que le chirurgien extrait de la vessie ou de la vésicule biliaire de son patient pour comprendre que ce qui nous pourrit à l'occasion l'existence a quelque chose à voir avec le latin calculus, « caillou ». Le nom scientifique de la maladie y afférente, « lithiase » (cette fois du grec lithos, « pierre »), en remet une couche. Cela dit, l'ancienne médecine était plus explicite, qui parlait de « gravelle », proche cousine de notre « gravier », voire, de façon plus lapidaire encore, de « maladie de la pierre » !
Mais pour la seconde ? Comment ce caillou en est-il venu à se glisser dans cette mécanique parfaitement huilée qu'est l'arithmétique ? Clair comme de l'eau de roche, là encore : avant que, beaucoup plus tard, le boulier et les calculettes ne fissent leur apparition, les Romains comptaient, justement, à l'aide de petits cailloux ! Serait-ce pour en perpétuer le souvenir que, sur les claviers de nos modernes ordinateurs, a été baptisée... « pavé numérique » la zone comprenant les chiffres et les symboles opératoires ? Il n'est pas interdit de rêver...
Ultime ironie de la langue, qui nous ramène peu ou prou à notre point de départ : le calculus latin a également, en son temps, désigné un jeton, une boule pour voter ! Il est à souhaiter que François Fillon ait récupéré le sien : il pourrait lui servir, aujourd'hui, pour faire pencher la balance de son côté lors de l'élection du président de l'UMP. Car un homme politique, calcul ou pas, ça a toujours les reins solides...
A-t-on suffisamment expliqué pourquoi les parents sont malheureux comme... la pierre quand leur progéniture passe pour n'avoir pas la bosse des maths ? Il nous semble que oui !