Bis, bistre ou brun foncé...

Ne perdez pas vos couleurs !

< mardi 24 septembre 1996 >
Chronique

Contrairement aux apparences et au risque d'en décevoir plus d'un, notre propos n'est pas de vous aider à perpétuer, au seuil de l'automne, le hâle de vos feues vacances. Il ne s'agit ici que de calmer les angoisses de tous ceux qui changent de couleur chaque fois qu'il leur faut orthographier les adjectifs du même nom...

Rappelons d'abord, dussions-nous par là même enfoncer une porte ouverte, que les authentiques adjectifs de couleur varient des plus normalement, à l'image de tous les autres adjectifs : une berline bleue, des habits violets. En revanche, les noms communs que l'on emploie occasionnellement comme adjectifs de couleur sont invariables : des reliures marron, des cartables orange, des chemises kaki. (Dans ce cas, il s'agit en effet d'une ellipse et l'on sous-entend à chaque fois de la couleur de.) Seuls font exception à cette règle les noms communs écarlate, mauve, pourpre et rose, que l'on a fini par assimiler à des adjectifs à part entière et qui prennent de ce fait la marque du pluriel : des tentures mauves, des lèvres pourpres. Certains ouvrages spécialisés rangent dans la même catégorie fauve et incarnat. À tort, à notre sens : si ces derniers sont effectivement variables, ce n'est pas en tant qu'exceptions mais tout simplement parce que ce sont, à l'origine, des adjectifs en bonne et due forme !

Il importe en outre de savoir que quand deux mots (ou plus) s'avèrent nécessaires pour qualifier un substantif, l'ensemble de l'expression est invariable dans tous les cas : que le second terme soit un adjectif de couleur lui aussi (des yeux bleu-vert), un adjectif d'un autre type (des carrosseries gris clair, des sacs brun foncé) ou encore un nom (des corsages jaune paille, des couffins rose bonbon). Détail qui n'aura certes pas échappé au lecteur attentif : le trait d'union n'est de rigueur que dans le premier de ces trois cas !