Le parcours du XV de France :
cahotant, cahoteux ou chaotique ?

< dimanche 30 septembre 2007 >
Chronique

Eu égard à la trajectoire — assez peu rectiligne ! — des Bleus dans cette Coupe du monde, gageons que la question se sera posée au commentateur, dès lors qu'il se pique de beau langage. Courageux dans une discipline où, plus souvent qu'à son tour, on « échappe la balle » et on « tombe des ballons », ce qui n'est pas vraiment indiqué au moment de « jouer les Blacks » ! Raison de plus pour ne pas aggraver son cas en s'emmêlant les pinceaux dans les trois susnommés. Principale bourde à éviter : écrire « cahotique », ce qui serait justiciable d'un carton rouge grammatical. Le cahot n'a, jusqu'à ce jour, enfanté en effet que deux adjectifs dignes de ce nom, lesquels sont soigneusement distingués par Larousse : est cahotant ce qui cahote, cahoteux ce qui fait cahoter. À cette aune-là, qui a du moins le mérite de la clarté, le chemin est cahoteux, la voiture cahotante. Ne croyez pas que l'on soit sorti de l'ornière pour autant. D'abord parce que Robert, qui est à l'œcuménisme ce que Bernard Laporte est à la volubilité, n'hésite pas à nous décrire, lui, des guimbardes cahotantes sur des routes non moins cahotantes ! Comprenne qui pourra. Ensuite et surtout parce qu'au figuré — le cas qui nous retient ici — il n'est pas toujours aisé de distinguer entre « parcours cahotant », (irrégulier en ceci qu'il présente des à-coups), et « parcours chaotique », (confus au point d'évoquer le chaos originel, autrement dit ce profond désordre qui aurait précédé la Création). À la différence de cahoteux, idéal pour qualifier l'état du terrain après le passage du bulldozer Chabal, l'un et l'autre adjectif nous semble à même de caractériser la progression de nos joueurs de rugby, transparents devant l'Argentine, pétillants face à la Namibie, laborieux puis inspirés contre l'Irlande. Pour trancher, il faudra — du moins, nous l'espérons ! — un peu plus que la rencontre franco-géorgienne de cet après-midi. Savoir par exemple si, dans le probable quart de finale de Cardiff, la Nouvelle-Zélande représentera un simple cahot supplémentaire sur une route que l'on sera autorisé à poursuivre... ou si elle plongera la France, son futur secrétaire d'État d'entraîneur et TF1 dans un chaos définitif ! Il y a d'ailleurs gros à parier que mauvaises langues, pisse-froid et pessimistes invétérés n'attendront pas le match de samedi prochain pour suggérer une troisième graphie, qui, tout bien pesé, ne serait guère plus engageante pour nos couleurs : K.-O. !