Êtes-vous Larousse ou Robert ?
C'est le moment de faire... vos Jeux !
Avec la cérémonie d'ouverture de vendredi va resurgir le dilemme qui, tous les quatre ans, déchire les salles de rédaction : convient-il d'écrire jeux Olympiques, à la suite de Larousse, ou Jeux olympiques, comme le prône Robert (du moins le Petit Robert 1, celui des noms propres faisant bizarrement sécession) ? La première version tient sans conteste la corde : il est de tradition de mettre la majuscule à l'adjectif, et les ouvrages de référence campent pour la plupart sur cette ligne. Il en va ainsi d'Adolphe Thomas (édité par Larousse, il est vrai), lequel, s'autorisant de l'Académie, cite en outre jeux Pythiques et jeux Floraux ; mais aussi de Girodet, de Hanse, de Dournon et de Jouette, quand ce dernier y mettrait peu de flamme ! Une telle unanimité n'a d'ailleurs d'égale que l'absence totale de justifications : d'ordinaire, on ne met pourtant de majuscule à l'adjectif que quand il est précédé d'un nom commun géographique (mer Rouge, lac Majeur, golfe Persique), ce qui, a priori, n'est pas précisément le cas du mot jeu ! Ou alors, lorsqu'il s'agit de sociétés commerciales, on en gratifie aussi le nom (Crédit Agricole), une troisième piste sur laquelle s'élance à grandes foulées Henri Bénac, plus timidement et à titre de variante le déjà nommé Joseph Hanse, et que favorise aujourd'hui le fréquent recours au sigle J.O. Pour notre part, nous avouerons notre préférence pour la version de Robert, qui a le mérite de se réclamer d'une loi connue de tous, que Jean-Paul Colin énonce ainsi : « Les noms des manifestations (commerciales, sportives, etc.) se composent avec une majuscule au premier substantif et, s'il s'en trouve un, à l'adjectif qui le précède. » Vous pensez qu'une règle aussi lumineusement exposée devrait conduire à opter pour Jeux olympiques ? Détrompez-vous : peu avant, ledit Colin avait lui aussi écrit... Jeux Olympiques, en reconnaissant à olympique le statut — inédit en grammaire — d'adjectif « déterminant ». Souvent linguiste varie, bien fol qui s'y fie ! Voilà qui va du moins réconforter les rédactions évoquées plus haut : quelque graphie qu'elles retiennent, elles sont assurées d'une caution. Voilà encore qui explique pourquoi, chez Pivot, les majuscules ne sont jamais prises en compte : si l'on veut rendre l'antenne à l'heure, mieux vaut ne pas courir au-devant des litiges...