À quel saint se vouer ?

Canon, cette nouvelle formule !

< mardi 13 février 1996 >
Chronique

On l'a assez répété, il vaut mieux avoir affaire à Dieu qu'à ses saints. Le conseil vaut aussi pour l'orthographe : loin d'être toujours innocents, ces saints-là nous réservent même quelques diableries dont ils ont le secret. Profitons de ce que cette rubrique, la première d'une nouvelle ère, tombe la veille de la Saint-Valentin pour rafraîchir les mémoires...

La vertu cardinale des saints est l'humilité. Il ne sert de rien, quand vous les invoquez, de leur donner de la majuscule : les saints, c'est bien connu, restent de glace devant de telles flatteries. Ne tirez pas davantage prétexte de leur mission pacificatrice pour les gratifier d'un trait d'union, vous les offenseriez plus encore. Appelez-les donc, le plus simplement du monde, saint Antoine et sainte Thérèse, ils vous en sauront gré. (Seul Saint Louis fait exception, le roi, chez lui, ayant pris le pas sur le saint : un exemple de plus de la dérive monarchique du pouvoir !) Ce n'est que lorsque le canonisé a donné son nom à un lieu — une envie qui démange beaucoup d'élus, et pas seulement ceux dont nous parlons —, à une fête, à un ordre que majuscule et trait d'union s'imposent : « l'église Saint-Éloi, la Sainte-Cécile, l'ordre de Saint-Benoît ». Il est vrai qu'il s'agit là de dénominations humaines et que l'homme n'a que faire de l'humilité !

Ces précautions prises, il vous faudra encore vous défier des abréviations (St, Ste), lesquelles ne sont pas toujours en odeur... de sainteté : seuls les authentiques bienheureux y ont droit, tant pis pour Sainte-Beuve et Saint-Exupéry !

Attention, enfin, aux caprices du lexique : d'aucuns prônent Saint-Esprit, mais Esprit saint. Point d'autre solution, alors, que de se référer aux Saintes Écritures, nous voulons dire Larousse, Robert ou Hachette. Au choix  : en dépit du contexte, il ne saurait être question pour nous d'entrer dans des querelles de chapelle...