Poupées russes et caverne d'Ali Baba
Christian TAVERNE-GRASSET
La Voix du Nord (toutes éditions)
18 janvier 2009
Dire qu'il n'y a encore pas si longtemps, il répugnait à envoyer un courriel, s'accrochant à son fidèle ordinateur version Windows 3.11 comme un naufragé à sa bouée ! Alors lui, surfer ? Et pourtant, aujourd'hui, ce blogueur invétéré — et ô combien talentueux ! — vient d'ouvrir son propre site sur Internet.
L'événement était attendu. Il a largement dépassé les espérances. On serait pourtant en droit d'imaginer qu'un site dédié à la langue française, dans ce qu'elle a de plus rigoureux, de plus tordu, de plus complexe, fût rébarbatif, triste et archaïque.
Que nenni ! C'est drôle, enjoué, brillant, surprenant, stylé... Et surtout riche, très riche ! L'intégrale absolue du « Petit Dewaele illustré », avec quelques savoureux bonus comme ces « cartes de vœux » (les bénéficiaires annuels en connaissaient le côté insolite) ou le texte original de deux fabuleuses conférences (« Faut-il brûler l'orthographe ? » et « La passion des mots »).
« Par mots et par vaux » (aucune autre enseigne n'aurait pu mieux convenir à cette caverne d'Ali Baba) offre bien évidemment la totalité des chroniques qu'il distille dans nos colonnes depuis le 16 juin 1995, avec les jeux associés ; mais aussi la rubrique aujourd'hui disparue « C'est pas ma faute », à consulter sans modération ; pour faire bonne mesure, quelque soixante dictées avec quatre niveaux de difficulté ; plus, cadeau non soldé, tous, oui, TOUS les livres publiés par Bruno Dewaele (La Danse du scalpel, Comme sur des roulottes, Les Allées d'Étigny...) ; ajoutez-y un « carnet d'adresses » aux allures de matriochkas ; et aussi, en vrac, du son, de l'image... Voire quelques jolis bijoux, comme ce « Parcours sans fautes », une émission sur FR 3 au début des années quatre-vingt-dix. Joyeusement rétro dans cette perle de modernisme.
Allez, on peut bien vous l'avouer, cette élégance de présentation, cette mise en musique si agréable, cette maquette soignée, c'est du Dewaele tout craché, certes. Mais signées Guillaume, « fils de », et webmestre (contraint et forcé ?) à ses — longues — heures. Le dernier mot reviendra cependant à Bruno, « père de » : « C'est Maurice Grevisse qui l'a dit lui-même, dans une formule qui se voulait définitive : “Il ne faut jamais admirer quelqu'un qui fait ce qu'il aime.” »