Vainqueur de la terrible Dictée des Amériques à Québec
Bruno Dewaele se retire
sur un fabuleux sans-faute
Christian TAVERNE-GRASSET
La Voix du Nord (toutes éditions)
21 mars 2006
Vingt et un ans au plus haut niveau. À tout le moins, Bruno Dewaele est un personnage exceptionnel ! Champion de France d’orthographe en 1985, champion du monde à New York en 1992, vice-champion de la superfinale des Dicos d’or en novembre 2005, il vient de s’imposer samedi à Québec, rendant une copie parfaite à la fameuse et redoutée Dictée des Amériques, uniquement réservée à la crème de l’élite. Et que pourtant, il y a trois ans, un autre Nordiste, Claude Vanhaverbeke, un professeur de mathématiques de Faches-Thumesnil, dompta pareillement.
« Difficulté relative »
Cent neuf candidats représentant vingt-quatre pays étaient cette fois réunis dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale du Québec, afin de plancher sur le pensum concocté pour l’occasion par l’artiste haïtien Luck Mervil, et que notre champion a trouvé « d’une difficulté relative ». Ben tiens...
« Finalement, tempère Bruno Dewaele, ce genre de texte est de ceux que l’on redoute le plus, car on y cherche des pièges qui n’existent pas. De ce fait, la moindre distraction peut être fatale. Ainsi, j’ai longtemps été perturbé par l’expression « en porte-à-faux », à cause des traits d’union. Mais le reste du vocabulaire, en revanche, ne m’a pas posé de problème. » Aucune faute aux tests, aucune faute à la dictée. Performance unique dans l’histoire de l’épreuve chez les « professionnels ».
Il est vrai qu’il connaît les dictionnaires de référence par cœur, et ne va pas se laisser désarçonner par un calame acéré, un filao, un balafon, un meurt-de-faim, un credo, un chef-d’œuvre, un héraut ou un essayiste postmoderne, fût-il malintentionné ! De ces mots-là, le champion, résolument insatiable, en sait des mille et des cents, et vainc tout.
La dernière
Voilà donc ce professeur agrégé, qui enseigne les lettres au lycée des Flandres à Hazebrouck, nanti d’une nouvelle et prestigieuse ligne sur sa carte de visite. Un honneur qui rejaillit également sur notre journal, puisque — les passionnés de belle langue ne manqueraient le rendez-vous pour rien au monde — il fait vivre avec compétence, talent, rigueur et humour la rubrique Langage, un mardi sur deux dans notre quotidien.
Encensé dans Le Journal de Québec, Le Soleil et La Presse de Montréal, Bruno Dewaele — qui était officiellement en « mission d’expertise pour le compte du ministère des Affaires étrangères » —, a cependant un gros regret : il a dû abandonner sur place — pour prévenir un évident excédent de bagages — bon nombre des livres qui lui avaient été remis en cadeau pour sa victoire. « Ce fut un véritable crève-cœur que de devoir les laisser, tant ma passion des bouquins est grande ! Je préfère ne plus y penser, et ne retenir que cette aventure exceptionnelle, et la richesse bigarrée des échanges avec des candidats de tous horizons. »
Après ce dernier sans-faute historique, Bruno Dewaele peut sereinement « prendre sa retraite » et abandonner — cette fois définitivement — la compétition, pour se consacrer désormais à l’élaboration de... dictées de concours ! Passion, quand tu nous tiens !