Si les oiseaux s'étaient trompés...

Paul de Glécy, 1989

Les oiseaux peuvent se tromper, le lecteur non. Les membres du jury A.L.P.HA. encore moins, qui décernèrent, il y a peu, leur récompense suprême à ce singulier homme de plume (de plumes ?) qu'est Paul de Glécy. Oserai-je affirmer, vu le contexte, qu'en l'occurrence nous avons affaire à un écrivain de haut vol ?

La formule a beau relever du jeu de mots facile, elle ne trahit pas la réalité pour autant : rien, chez lui, qui pèse ou qui pose ; rien que le froissement d'ailes majestueux de celui qui, au dire du poète, « plane sur la vie, et comprend sans effort le langage des fleurs et des choses muettes »...

Mais les oiseaux ne vous branchent peut-être pas ? Vous seriez plutôt du style « Vos gueules les mouettes » ? L'outarde vous monte au nez au moindre gazouillis ? Ne vous faites pas de mouron pour si peu : les oiseaux qu'élève le sieur de Glécy, quand ils ne seraient pas tous de laine ou de soie, ne manquent ni d'étoffe ni de panache. Ici nulle oie blanche, pas le plus petit roucoulement de tourterelle ; pas davantage de ces merles dont nous autres lecteurs, plutôt que de claquer du bec, devons nous contenter trop souvent, tout en rêvant aux grives.

Bref, rien de ce qui fait ces rossignols qui peuplent les plus hautes de nos étagères. Ici, originalité oblige, ce sont les ordinateurs qui jouent les grues et le miroir, quand on l'interroge, révèle tout autre chose que les sempiternelles alouettes.

L'auteur, vous le constaterez... chemin faisan, est entre tous ces oiseaux le plus rare : un rien fou, sans doute, de cette folie créatrice qu'a si bien mise en images son — inséparable ! — complice Gérard Constant ; pas le moins du monde manchot, en tout cas, lorsqu'il s'agit de nous pondre ses textes. Car s'il donne à ses nouvelles des noms d'oiseaux, jamais Paul de Glécy n'insulte la langue : sa phrase, indemne de tout nid-de-poule, est un perpétuel chant du signe.

Mais le préfacier n'a que trop joué les pies quand à l'évidence il lui suffisait, pour clamer son admiration (et son envie), d'un long sifflement. Laissez-le donc se parer, ô combien inutilement, des plumes du paon et prenez plutôt la liberté... d'entrer dans la cage. Le temps, lui aussi, est tout prêt à y suspendre son vol.