ON EN PARLE

Inspecteur la Bav... ure !

lire:
Numéro 497
juin 2021

S'il est une catégorie de verbes qui souffre au premier chef de la dysorthographie ambiante, c'est bien celle-là. Le moyen, il est vrai, de se défendre efficacement quand on n'est que cinq, même en raclant les fonds de tiroirs : conclure, exclure, inclure... occlure et perclure ? Allez donc bâtir un syndicalisme de masse avec ça !

Il faut dire aussi qu'ils l'ont un peu cherché, incapables qu'ils se sont montrés jusqu'ici de s'accorder ne fût-ce que sur leur participe passé : inclus, occlus et perclus, mais conclu et exclu ! On en a snobé pour beaucoup moins. C'est au féminin surtout que les choses se gâtent : savoir qu'une dent incluse mériterait d'être exclue de votre mâchoire, vous avouerez que ça ne tombe pas sous le sens, pas plus que ça ne fait honneur à notre langue réputée cartésienne...

Cela dit, le bât ne blesse pas que pour le participe, il n'est que de parcourir les colonnes des journaux pour s'en persuader. Fi des « s » et « t » pourtant caractéristiques des verbes du troisième groupe, souffre souvent mille morts le présent de l'indicatif : « "Je n'exclue pas que d'autres départements connaissent de nouvelles mesures, prochainement, en fonction des indicateurs", a révélé ce mardi Gabriel Attal » (Var-Matin) ; « J’ai une prédilection pour les créations aux drapés vaporeux et évanescents que j’inclue dans toutes mes collections » (Paris Match) ; « Elle conclue : "Ne plus pouvoir se verser de salaire fait peur, mais on résiste" » (Ouest-France). Ensuite, et peut-être plus encore, le futur simple et le conditionnel : « Si la partie civile ne fait pas appel de cette décision, près de dix années de procédure se conclueront par un constat d’échec » (L'Obs) ; « Elle souhaiterait se présenter à la prochaine élection présidentielle dans le cas où Joe Biden excluerait un deuxième mandat » (Gala) ; « Il a annoncé la formation d'un groupe de coordination qui incluera trois représentants de chaque État » (Le Point).

Il n'est que trop clair qu'à chaque fois nos héros malheureux du jour se voient là confondus avec d'autres verbes, du premier groupe et en -uer ceux-là. Il n'y a en effet rien d'anormal à ce que, pour ces derniers, le « e » de l'infinitif subsiste au terme ou au cœur de la forme verbale : j'éternue, tu dilues, il mue, nous évacuerons, vous tueriez, elles s'embueront.

Pour autant, que l'on n'en... conclue pas que ledit « e » soit toujours hors la loi dans la conjugaison des verbes en -ure : il recouvre l'intégrité de ses droits au subjonctif, et des phrases telles que « Je veux que l'on inclue cette clause au sein du contrat » ou « Avant que l'on n'exclue qui que ce soit, assurons-nous du bien-fondé de notre décision » n'ont évidemment rien que de très correct.

Bref, on le voit, conjuguer sans faillir ces maudits verbes en -ure... n'a rien d'une sinécure !