Ne dites pas :
un homme frustre
samedi 22 juin 2002
Non que nous nous élevions, dans ce qui serait un combat d'arrière-garde, contre le sens courant de cet adjectif, depuis longtemps entré dans les mœurs. Tout le monde en fait aujourd'hui un synonyme de « grossier », même si, à l'origine, il n'en était rien : on n'y recourait que pour qualifier ce qui était « usé par le frottement »... Stricto sensu, ironise Pierre Laurendeau dans son précieux petit livre Le français, cent difficultés (éd. Le Polygraphe), un fonctionnaire ainsi désigné serait un employé modèle, qui a « poli son derrière par une présence assidue sur sa chaise » ! Notre réserve initiale, mais on l'avait compris, portait bien plutôt sur la présence incongrue du r dans la syllabe finale, probable résultat d'un « croisement » avec rustre et frustré : c'est fruste qu'il vous faut écrire, si vous ne voulez pas vous couvrir d'opprobre (n'oubliez pas, en revanche, le second r de celui-là).