Injection ou injonction :
les dangers insoupçonnés
de la paronymie...

< dimanche 21 février 2021 >
Chronique

On s'est longtemps demandé pourquoi la vaccination, au pays de Pasteur, se révélait à ce point laborieuse. Depuis un récent article du magazine Voici, que l'on nous a obligeamment signalé, on ne se le demande plus.

Notre confrère explique en effet que, si le président a d'abord pris tout son monde à contre-pied, c'est que, essayant de « retenir au maximum les décisions pour laisser de l'oxygène au pays », il n'avait pas voulu « céder à la panique et encore moins aux injections ». Tout s'éclaire enfin, se seront dit les lecteurs dudit article : si le chef de l'État a repoussé sine die le confinement, il y a quelque trois semaines, ce n'est pas qu'il ait sa dose de tous ces médecins qui prétendent lui forcer la main, c'est tout simplement qu'il fait partie de ces gens que l'on appelle les « antivax » !

On aura heureusement compris qu'il s'agissait plutôt là d'une de ces malheureuses coquilles contre lesquelles, c'est à craindre, nous ne serons jamais complètement vaccinés. Ou plus vraisemblablement d'une confusion entre ces injections que l'on voit se répéter, en boucle et à longueur de journée, sur les écrans de l'information en continu (il faut dire que si l'on vaccinait autant dans la vie réelle, il y a longtemps que le seuil de l'immunité collective serait atteint !) et les injonctions du conseil scientifique, lesquelles constituent, dixit le Petit Larousse, des « ordres formels d'obéir sur-le-champ ».

Voilà à tout le moins une salutaire piqûre de rappel, qui vient à point souligner combien il est dangereux d'employer un mot pour un autre, sous prétexte que ces paronymes (c'est le nom que leur donnent les spécialistes) se ressemblent beaucoup. On en arrive ainsi à ce que des feux de forêt soient régulièrement « circoncis », que d'aucuns soient poursuivis pour « subordination » de témoin, que des Premiers ministres refusent d'être traités (par certains qui ne manquent pas d'air) en victimes « expiratoires », que des crimes soient « perpétués » par des malfrats qui n'ont pourtant rien de tueurs en série, que le groupe sanguin O+ soit censé renforcer nos défenses « humanitaires », que Donald Trump soit pourfendu pour ses propos « inflammatoires », que d'authentiques saintes — horresco referens ! — se tripotent l'« aréole » sans vergogne ou que les cartes se trouvent irrémédiablement « rabattues » à chaque mutation de ce satané virus !