Juillettistes, aoûtiens...
Ça suffixe comme ça !
Il en va des clichés comme des grandes équipes : ils ne meurent jamais. Vous verrez que, sous l'égide de Bison futé, nous aurons droit dans les heures qui viennent, et sur toutes les ondes que Dieu fait, à l'inévitable chassé-croisé de juillettistes — bronzés et détendus, comme il se doit — et d'aoûtiens, lesquels n'auront évidemment qu'une hâte, se dépouiller de ce teint aspirine qui, de nos jours, semble paradoxalement dépourvu de tout cachet... Loin de nous l'idée, rassurez-vous, de flétrir ces néologismes, quand bien même ils nous paraîtraient peu harmonieux : s'ils se sont imposés (au mépris du calendrier, d'ailleurs, aoûtien devançant juillettiste de quelques années), c'est qu'ils devaient correspondre, après tout, à une nécessité. Contentons-nous plutôt de souligner notre propension à créer de nouveaux mots par adjonction de suffixes, et ce, dans une franche anarchie. L'atteste le désarroi de la gent politique, friande d'étiquettes par nature, et qui s'en remet, semble-t-il, à l'oreille pour « labelliser » ses groupies. À moins qu'il ne faille supposer que barristes, jospinistes et lepénistes prennent leurs vacances en juillet quand leurs homologues balladuriens, fabiusiens et rocardiens ne jurent que par août ? Si tel était le cas, il faudrait en conclure que les partisans de Charles de Gaulle et de François Mitterrand bourlinguaient durant tout l'été puisque, remarque Sylvie Brunet dans son récent ouvrage Les mots de la fin du siècle (Belin), ce sont les seuls de nos hommes politiques à s'être vus gratifiés de deux adjectifs : gaulliste et gaullien, mitterrandiste et mitterrandien (les premiers pour le militantisme, les seconds pour la pensée profonde). Les autres présidents n'ont pas connu cet honneur, qui n'eurent à leur solde que pompidoliens, giscardiens et... chiraquiens (l'espoir demeurant dans ce dernier cas !). Dans cette compétition permanente qui l'opposait au général, François Mitterrand aura déjà fait jeu égal sur le terrain du langage...