Une case en moins, une règle de plus

De la paillote à la cabane

< mardi 18 mai 1999 >
Chronique

Que l'on ne s'y trompe pas, notre propos ne saurait être ici de souffler sur les braises encore fumantes de Cala d'Orzu. Encore moins de résumer, par ce titre lapidaire, l'itinéraire ô combien tourmenté du préfet Bonnet. Le chroniqueur du langage se bornera à constater que paillotes et installations apparentées ont de tout temps constitué un terrain miné, jusque sur le plan orthographique. Ces constructions de fortune, en effet, ne sont que trop promptes à s'effondrer sur les têtes brûlées qui, loin de vouloir toujours les mettre sur le sable, se risquent seulement à les coucher sur le papier. C'est la baraque que l'on a tôt fait de casser en la faisant plier, à l'instar de la barrique, sous le poids d'un second r. C'est la cahute dont on est tenté de consolider les fondations en la gratifiant d'un t supplémentaire, histoire de l'aligner, non sans logique d'ailleurs, sur sa voisine la hutte. C'est surtout cette paillote dont personne sans doute n'aurait juré, avant que la presse entière ne prît feu pour elle, qu'elle se satisfît d'un t. La règle, telle qu'elle est formulée dans la célèbre méthode Thimonnier, n'est en fait rassurante que pour les masculins en -ote, lesquels ne redoublent jamais la consonne : antidote (mais encore faut-il savoir que celui-là est masculin !), Cataphote, coyote, despote, patriote, etc. Au rayon des féminins, les choses sont, hélas, moins simples. Un recours existe bien pour ceux qui correspondent à un masculin en -ot, la tradition voulant que les diminutifs prennent deux t (jeunotte, maigriotte, pâlotte, vieillotte), quand les autres n'en utilisent qu'un (bigote, dévote, huguenote, manchote, nabote, parigote, parpaillote, poivrote). Mais il n'en faut pas moins compter avec les inévitables exceptions : pour être des diminutifs en bonne et due forme, petiote et fiérote se contentent d'un t alors que sotte, qui n'en fait pas partie, en reçoit deux ! Pour ce qui est, enfin, des substantifs féminins qui ne dérivent pas d'un masculin en -ot, point d'autre solution que de tirer... à la courte paille !